Il ne s’est pas fait une place facilement mais cela va bientôt faire 4 ans que le voyage est au centre de mon cœur. Chaque destination apportant son lot d’enseignements et de sentiments. Tic-Tic-Tic-Tic… l’ouvrage était de taille et la mécanique fichue bien avant l’heure.
Je pensais au mieux qu’il m’aiderait à changer mes humeurs mais, petit à petit, il est aussi parvenu à faire redémarrer mon cœur. Le voyage sur la voie de la guérison me rendait meilleure.
C’est fin 2011 que je me suis lancée. A cette époque ne résonnait en moi que de la peur et de la douleur. Je ne pouvais plus rester alors j’ai foncé tête baissée vers un ailleurs.
8 mois plus tard, j’ai mis la main sur quelques pièces et j’ai même cru orgueilleusement que cela serait suffisant. Je n’étais plus la même, j’avais appris le pardon. Dorénavant, j’étais sensée pouvoir encaisser sans avoir à tout verrouiller comme avant.
Rentrée apaisée mais claquée, j’ai passé la plupart de mon temps à tenter d’assembler tout ce qui traînait. Je ne pouvais plus reculer mais merde je n’avais pas prévu un tel chantier. Je n’avais pas prévu que les battements retrouvés provoqueraient un tel chaos intérieur. Alors de nouveau, je suis repartie chercher ailleurs.
Il y aura eu Berlin, Prague, Strasbourg… les villes se sont enchaînées sans grand succès. J’avais beau être accompagnée, c’est pourtant seule à Porto que j’ai commencé la mise à l’heure.
La tête ailleurs, les yeux et le sourire rieurs, une musique dans le cœur… à Porto j’ai retrouvé la symphonie du voyageur.
Imparfaite et bien plus douce que ses voisines, je me suis sentie bien à ses côtés. Les fausses notes étaient toujours là mais elles accompagnaient à merveille chacun de mes pas. Peu à peu, l’envie reprenait le pas sur la peur.
J’étais enfin parvenue à mettre la main sur le ressort, celui dont j’avais besoin pour soulager mon organe moteur. J’avais appris la bienveillance.
En Jordanie, j’ai encore repris quelques couleurs. Au coin du feu, j’ai pleuré en entendant Mohamed chanter dans le désert. Dans sa voix, il y avait une incroyable chaleur. De celle qui vient de l’intérieur et parvient à réchauffer le cœur. J’avais appris la douceur.
En Italie, j’ai compris que si certaines pièces se fixent et s’embellissent avec le temps, d’autres resteront cassées à jamais. Quand il n’y a pas assez de cran, mieux vaut ne pas toucher au remontoir et les laisser appartenir aux souvenirs du passé. J’avais appris la résilience.
Au Japon, j’ai perdu toute notion de temps. Hypnotisée, émerveillée, totalement déphasée. Comment vivre au présent quand le futur et le passé se mêle sans arrêt ? On oublie le temps, on s’oublie un moment. J’avais ré-appris à rêver.
En Afrique du Sud j’ai été bousculée au propre comme au figuré. Cette solitude en voyage autrefois tant recherchée était en train de m’inonder. Lentement mais sûrement je sombrais, jusqu’à ce que l’on me prenne la main au moment où je m’y attendais le moins. La machine s’est emballée, les minutes m’ont paru être des années et à son poignet je me suis imaginée. La magie faisait qu’à 6000 kms de distance nos montres étaient accordées. Puis de doutes en mensonges, les rouages se sont grippés, les aiguilles ont arrêté de tourner et le cadran a fini par exploser. J’avais découvert la lâcheté.
J’ai pleuré et laissé des plumes comme jamais. Comment étais-je sensée voyager avec un cœur rouillé et des ailes cassées ? J’avais appris à gérer tant bien que mal avec le Jet Lag mais le Crash, je ne le connaissais pas encore. J’avais toujours bien pris soin de l’éviter.
En Andorre et en Suisse, je suis partie marcher. J’ai fermé le robinet à questions et je me suis fondue dans le paysage pour un trop court instant. Alors pour avancer, il a fallu que je parte plus loin, plus longtemps, seule et sans notion du temps. Ce sera l’Australie. Je pouvais difficilement faire plus radical. Les vagues ont été violentes et apaisantes comme il le fallait et les « No Drama » sont parvenus à soulager mes pas. J’avais appris l’insouciance.
J’ai beaucoup appris du moins en théorie et, malgré la peur de la panne de moteur, je sais que seule la pratique m’aidera pour la remontée mécanique.
Tic-Tic-Tic-Tic, je continue le voyage jusqu’à temps de mettre mon cœur à la bonne heure.
14 Comments
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Bonjour, je découvre tout juste ton blog et que ta plume est belle… Tu m’as donné envie de découvrir tous tes voyages passés !
A très vite, Amandine
Bienvenue Amandine, j’espère que tu feras de jolies découvertes sur le blog 😉
Tout simplement magnifique… je me retrouve beaucoup dans tes mots doux.
C’est toujours un peu étrange quand on me dit ça mais ça me touche beaucoup… peut-être que ça me rassure même ! Mercie Lucie.
J’aime la poésie que dégage ton blog à travers tes récits et tes photos. Mais ce billet et celui sur ton grand-mère sont tout simplement merveilleux.
Moi qui suis souvent frustrée de ne pouvoir exprimer comme je le souhaite, d’une manière ou d’une autre, certaines émotions, j’apprécie particulièrement te lire. Et je me reconnais énormément dans ce que tu écris ici.
Ce sont des billets que j’ai toujours un peu de mal à publier alors un grand merci pour ton message Perrine !
Superbe texte, d’une grande profondeur et pourtant si léger à lire. Viens, oublie la mécanique, on va se repérer avec les étoiles.
Se repérer et se réparer 😉
Que c’est joli, et triste à la fois. Je me retrouve bien dans ces allers-retours émotionnels, dans cette espèce de fuite-course-poursuite. Il y a ces moments où tout semble parfaitement clair, parfait, solide. Et ces autres où tout s’effondre, ou la logique se perd. Et nous ne sommes qu’un tout petit point, navigant entre deux limites imperceptibles.
Le Tic sans Tac c’est triste oui comme tu dis et puis c’est usant aussi. On navigue oui mais on aimerait bien poser l’ancre à un endroit sûr. Enfin moi j’aimerais bien ! Et puis j’aimerais bien qu’on se croise aussi un de ces quatre 🙂
Alors oui, j’aimerais bien ça aussi, qu’on se croise un de ces quatre 😉
J’adore ! Ton texte est magnifique, l’écriture est belle, le message de fond, sublime. Je pense que tu ne pouvais pas mieux exprimer ce que je ressens : Je continue le voyage jusqu’à temps de mettre mon cœur à la bonne heure… Je passe aussi souvent par des moments de grands néants, au point de me demander qu’est-ce que je fous encore à voyager si cela me chamboule autant. Mais je ne me vois pas faire autrement pour l’instant. Il y a beaucoup trop de chose qui restent encore à accorder. Et je n’ai pas trouvé meilleure cure que le voyage 🙂
Merci pour ces mots rassurants et riches de sens. Profite de tes voyages et j’espère à bientôt sur les routes 😉
C’est vraiment bien écrit, ça donne envie de se plonger un peu plus dans ton site!
[…] La mécanique du cœur en voyage : poésie sentimentale. J’avais envie de citer aussi Souvenirs acidulés du Pays Basque mais je crois que c’était encore 2015… […]